C'est le secteur industriel qui porte aujourd'hui majoritairement le poids des enjeux liés au traitement des eaux usées. En effet, à échelle mondiale, l'industrie consomme un quart des volumes d'eau employés par les activités humaines. Pour se débarrasser de leurs effluents, deux options s'offrent aux industriels : les rejeter vers les STEP municipales, par exemple, ou les traiter. Ce deuxième cas de figure est de plus en plus favorisé et l'optimisation du processus est cruciale pour une gestion globale de l'eau qui soit plus économe et raisonnée.
Un contexte coercitif grandissant : la nécessité de mieux traiter les eaux usées
De nombreux éléments liés à l'évolution de la situation économique et environnementale convergent vers un besoin urgent de traiter de plus gros volumes d'eaux usées et de mieux les traiter.
Une disponibilité limitée des ressources…
Le premier facteur est la disponibilité limitée des ressources en eau. Plus d'un quart du territoire français est concerné par des périodes de sécheresse dont la fréquence et la gravité ont augmenté de 29% en une génération (chiffre de l'ONU). Les ponctions en milieu naturel sont donc de plus en restreintes, soit par la force des choses, les nappes phréatiques n'étant pas inépuisable, soit par des réglementations.
Ces réglementations ne sont pour la plupart pas nouvelles, mais la marge de tolérance appliquée s'est drastiquement réduite ces dernières années, les contrôles des régions se faisant plus fréquents et plus stricts. Les mesures coercitives proviennent également des assureurs, qui sont de plus en plus regardants sur la capacité des industries à rester opérationnelles en cas de pénurie.
…qui génère des conflits d'usage
La limitation des ressources en eau génère aussi des conflits d'usage, principalement entre privés et professionnels. Cela incite fortement les industriels à agir pour réguler leur consommation, n'étant pas prioritaire dans l'équation.
Un prix croissant de l'eau et de l'énergie
Un autre facteur de taille est celui du prix de l'eau et de l'énergie de manière générale. L'eau commence à avoir un coût non négligeable. En effet, d'après une enquête de 60 Millions de consommateurs, le prix du mètre cube a augmenté de 10% ces dernières années, pour atteindre un prix actuel moyen de 3,5€ ; mais à ça s'ajoute le coût du pompage et des traitements nécessaires à l'utilisation de l'eau, procédés gourmands en énergie, dont le prix a monté en flèche ces derniers temps. Faire des économies d'eau, c'est donc aussi faire des économies d'énergie, un enjeu central pour les industriels.
Des enjeux d'image de marque
A ces différents facteurs économiques et environnementaux s'ajoutent des enjeux d'image. Les entreprises prennent des engagements en RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) pour s'adapter au contexte actuel. Elles se doivent alors de respecter leurs engagements, sous peine de très mauvaise presse et d'accusations de greenwashing, par exemple.
La prise de conscience est donc urgente mais n'est malheureusement pas encore généralisée. Encore de trop nombreux acteurs ne se posent pas la question de la disponibilité de la ressource, pompant dans les nappes phréatiques sans même connaître leur niveau d'approvisionnement. D'autres sont persuadés de ne pas rejeter de polluants, ou n'étudient pas la question. Hors, les industriels sont les plus à même d'optimiser leur consommation et leur gestion de l'eau, car ils ont la possibilité d'installer des procédés de traitement en interne. L'évangélisation du sujet et les adaptations techniques sont donc un enjeu de taille dans le traitement des eaux usées.
Procédés de traitement des eaux usées : un accompagnement indispensable
Pour répondre à ces enjeux, les industriels ont besoin d'être guidés et accompagnés dans la mise en place d'installations adaptées à leur activité et à leur consommation d'eau.
De A à Z
A cette fin, Naldeo intervient sur tout le processus, de l'audit jusqu'à la maîtrise d'œuvre. Dans un premier temps, il s'agit de décortiquer ce qui se passe sur le site, en faisant un diagnostic technique et énergétique des installations existantes, et des mesures par prélèvement de l'eau dans l'usine ou à sa sortie (bilans 24 h) ou même parfois à l'intérieur de l'usine pour identifier les flux de pollution par atelier.
Une fois le diagnostic dressé, un plan d'action de réduction des transferts de pollution peut être mis en place et si nécessaire, un dimensionnement d'installation de traitement et la conception d'une filière de traitement sera réalisé.
Des études de risques sont également faites afin d'étudier la résilience de l'activité en cas de pénurie d'eau. Un plan d'action est ensuite imaginé, associé à la réalisation d'études de faisabilité pouvant aller jusqu'à la maîtrise d'œuvre pour la mise en place des installations projetées.
Des compétences multiples
La clé du succès d'un tel projet est de connaître l'activité de l'industriel en profondeur, afin de comprendre précisément son usage de l'eau, d'analyser les transferts de pollution (perte de matières premières). La majorité des technologies est déjà existante, et, même si des innovations techniques peuvent permettre, avec l'ajout d'étapes dans le processus de traitement, d'améliorer le rendement et la qualité du traitement ou de rendre l'installation plus compacte pour limiter les coûts fonciers, c'est la compréhension des effluents qui fait la différence.
L'agrégation de compétences variées est donc nécessaire à la maîtrise d'un sujet qui mêle différentes problématiques : chimie fondamentale , biologie, génie civil, électromécanique et hydraulique.
Le sur-mesure : facteur clé de succès
La notion de sur-mesure est également primordiale, chaque secteur d'activité et chaque usine ayant des spécificités propres, dues aux méthodes de travail, à l'organisation du temps de travail, à l'ordonnancement des produits ou encore à la fréquence du nettoyage. Dans l'agroalimentaire par exemple, c'est l'hygiène qui prévaut et beaucoup d'eau est utilisée pour du nettoyage. Les marges étant assez faibles dans le secteur, réduire les coûts d'utilisation de l'eau dans la production peut permettre d'augmenter ces marges de manière non négligeable. Les problématiques sont différentes dans le secteur très surveillé de la pharmaceutique, qui rejette des polluants en quantité microscopique, mais avec un niveau de toxicité élevé.
Une intervention en amont et en aval du traitement des eaux usées
Afin d'aller encore plus loin, il est recommandé d'étudier les étapes en amont et en aval du traitement des eaux usées, afin de permettre une optimisation sur tout le circuit.
En amont, l'enjeu est déjà de réduire au maximum la consommation d'eau et les transferts de pollution. Ensuite, il est possible de prélever de l'eau habituellement inexploitable et de la traiter afin qu'elle devienne compatible avec certains procédés chimiques ou avec les circuits de chauffage. Nos équipes ont par exemple accompagné un industriel dans le secteur de la chimie afin qu'il puisse utiliser dans son activité de l'eau de l'Oise en l'assainissant au préalable. L'installation, qui représente un investissement d'environ 2 millions d'euros, permet de traiter 300 mètres cubes d'eau par heure.
En aval, cela peut s'illustrer par une étude de conception d'évapo-concentration pour limiter les rejets. Le procédé consiste à déclencher une évaporation partielle de l'eau pour réduire les volumes d'eau traitée ensuite et recycler une bonne partie.
L'avenir du traitement des eaux usées : le recyclage
Sur la question du traitement des eaux usées, l'objectif est d'aller de plus en plus vers le “zéro rejet” et le recyclage, incité par l'augmentation des aides financières qui soutiennent ces initiatives, notamment l'agence de l'eau qui peut financer ce genre de projet avec des bonifications d'aide à hauteur de 50%. Le recyclage implique de réutiliser l'eau traitée dans le cadre de l'activité dont elle provient. Cela peut être pour alimenter la chaudière, laver les sols, voire même être réutilisé dans le processus de production lorsque cela s'y prête. Toutefois, les obstacles à la généralisation du recyclage sont nombreux.
Un problème de qualité…
Si une eau traitée peut être rejetée dans le milieu naturel, les critères sanitaires auxquels elle répond alors ne permettent pas forcément sa réutilisation. En effet, certains processus industriels ne tolèrent pas d'eau recyclée. S'il est facile de réutiliser de l'eau pour laver des sols, pour reprendre l'exemple du secteur agroalimentaire, il est impossible de mettre en contact des aliments avec le l'eau réutilisée. De manière générale, le recyclage de l'eau nécessite donc un contrôle très strict de l'eau et des potentiels résidus dangereux qui pourraient subsister.
…et un coût d'investissement conséquent…
La hausse des coûts directs et indirects de l'eau et de l'énergie participent à une meilleure rentabilité des investissements réalisés, mais ils restent tout de même très coûteux. Les projets de recyclage nécessitent l'adaptation de toutes les installations, car l'eau recyclée doit être gérée dans un réseau d'eau spécifique. Tout le circuit d'eau doit donc être dédoublé. La mise en place du recyclage ne se fait pas sans étudier l'intérêt économique du projet, qui est encore un frein de taille.
…pour les bénéfices de l'autonomie
Pourtant, il est nécessaire d'encourager et de développer ce genre de projet. Pour cela, Naldeo est en train d'étudier la faisabilité du recyclage pour une usine agro alimentaire, qui, de par la conception de produits pasteurisés et donc moins sensibles, a un meilleur potentiel de recyclage que d'autres industries du secteur.
“Elle a tout intérêt à être autonome, à produire au maximum son énergie (via la méthanisation de ses eaux usées en remplacement de GNL) et à recycler l'eau,”, explique Jérôme Gay, Directeur de la région AURA chez Naldeo et expert du sujet du traitement des eaux. Il ajoute que “le projet étudié pourrait leur permettre une autonomie de 20% pour l'énergie et de 80% pour l'eau, tout en évitant les conflits d'utilisation entre agroalimentaire et consommation domestique. En plus, l'usine se situant dans un milieu environnemental sensible, les rejets d'eau seront de plus en plus limités.” C'est autant d'arguments en faveur du recyclage de l'eau à mettre en avant pour les industries qui n'osent pas passer le cap.